[MUSIQUE] [ROUSSEAU] [HUITIÈME DUC D'UZÈS]

Méthode pour apprendre en peu de tems la Musique suivant le livre intitulé : Dissertation sur la Musique Moderne Par M. Rousseau.

Après 1762

In-8 (200 x 125 mm), (2) ff., 64 pp., (3) ff., cartonnage recouvert de papier d'Augsbourg, dos recouvert de papier à la colle rouge, étiquette manuscrite au dos, tranches peintes en rouge (Reliure de l'époque).

UN MANUSCRIT DE MUSIQUE DE LA MAIN DE DELOCHE, BOUFFON FANTASQUE DU BOSSU HUITIÈME DUC D'UZÈS.

IL S'AGIT D'UNE MÉTHODE POUR APPRENDRE LA MUSIQUE ABRÉGÉE D’APRÈS LA DISSERTATION SUR LA MUSIQUE MODERNE DE JEAN-JACQUES ROUSSEAU, TÉMOIGNANT DE SON APPLICATION CONCRÈTE DANS L'ENSEIGNEMENT MUSICAL DE L'ÉPOQUE, POUR LE CLAVECIN EN PARTICULIER.

DELOCHE L'A RÉDIGÉE POUR L'EXTRÊMEMENT JOLIE MARIE GABRIELLE DE GUEYDON, ALORS DUCHESSE DOUAIRIÈRE D'UZÈS, QUE LE DUC AVAIT ÉPOUSÉE EN SECONDES NOCES.

JOLI CARTONNAGE DE L'ÉPOQUE RECOUVERT DE PAPIER D'AUGSBOURG.

La fabuleuse histoire de Charles-Emmanuel de Crussol, huitième duc d'Uzès dit le Bossu, de Deloche et de Marie Gabrielle de Geydon est rapportée dans l'Histoire des ducs d'Uzès de Lionel d'Albiousse (1887). Il se pourrait qu'elle soit un peu romancée.

Balle et bosse
Charles-Emmanuel de Crussol (1707-1762), premier duc et pair de France, était, lit-on, "un fort joli homme bien fait, d'une physionomie agréable et spirituelle." [...] "[...] très intelligent du reste, [il] reçut une brillante éducation. Poète, il chanta sa bosse et devint plus tard philosophe et ami de Voltaire [...]".
"C'est à la bataille de Parme, livrée en 1734 [dans le cadre des guerres de succession de Pologne], que le duc de Crussol étant à la tête de son régiment et au premier rang, genou terre, selon l'usage de l'époque, reçut une affreuse blessure. Une balle lui fracassa la mâchoire et sortit par l'épaule droite. [...] Cette blessure le rendit bossu et en outre lui cloua les mâchoires au point qu'on fut obligé d'enlever deux ou trois dents afin de laisser une ouverture pour pouvoir introduire des aliments dans la bouche."
Le duc fut transporté à Paris où il fut remis sur pieds. "Sa blessure l'obligeant à se retirer du service militaire, il s'occupa des intérêts généraux du pays."

Duel avec le comte de Rantzau et retour à Uzès
"[En 1740] un soir à l'opéra, il avait une boite de bonbons à deux compartiments, un pour les dames, qui contenait des bonbons exquis, et un autre renfermant des dragées amères qu'il s'amusait à offrir à plusieurs seigneurs, notamment au comte de Rantzau, qui se fâcha, ce qui fit rire les autres. Le comte de Rantzau, piqué, lui cracha les dragées à la figure [...]"
[...] "[L'inévitable duel] eut lieu. Le comte et le duc se battirent à l'épée dans Paris, au Luxembourg, derrière le couvent des chartreux.

Le comte de Rantzau, allemand, parent de la reine Marie Leczinska, était un grand garçon très fort ; le duc était petit et bossu. Ils se blessèrent d'abord tous deux légèrement, mais le combat continuant le duc tua raide son adversaire." [...] Cette affaire fit grand bruit. On trouva qu'elle était fort glorieuse pour le duc d'Uzès, pour sa famille et son titre de premier duc et pair de France. Néanmoins une lettre de cachet fut lancée à cette occasion contre le duc qui fut exilé à Uzès, et son exil dura plusieurs années.
"Ce fut une bonne fortune pour notre petite ville que le séjour si prolongé du duc avec toute sa maison. Il y vécut en grand seigneur."

Un original de Montpellier, le capitaine Deloche 
"Le duc d'Uzès était du reste, malgré les ennuis de sa blessure, d'un caractère gai et jovial. Il aimait, pendant le carnaval, à courir les bals particuliers avec ses courtisans et à se mêler à toutes les fêtes locales. Il avait à son service un original de Montpellier, nommé Deloche, que le duc avait nommé par dérision capitaine de ses gardes quoiqu'il n'en eût pas. C'était un excellent musicien, un peu bouffon et rimailleur, mais très bon diable. Aussi servait-il de plastron aux mille plaisanteries de la part du duc et de ses courtisans. Il les amusait tous et ne cessait de composer des vers dont il faisait toujours hommage à M. le duc."
Voici comment fut dépeint Deloche lors d'une fête donnée par le duc de Saint-Mégrin :
Vous y verrez un vieux poète
Plus desséché qu'un parchemin
Portant figure de squelette
Les cheveux frisés en boudins
Dans le bourbier de l'hélicon
II pêcha un opéra bouffon
Ah, la pièce curieuse
La rareté merveilleuse, etc.

Mademoiselle de Gueydon, pour qui le duc fit percer les remparts d'Uzès
"Le duc était surtout retenu à Uzès par l'amour que lui avait inspiré une jeune fille extrêmement jolie, Mlle de Gueydan (sic). Elle demeurait avec sa famille dans la rue Massargue. Cette rue n'était alors qu'un cul-de-sac aboutissant aux anciens remparts.
Le duc, pour arriver plus facilement chez cette famille en voiture fit ouvrir le rempart et construire une porte. Mais dans la crainte d'une opposition de l'évêque en sa qualité de co-seigneur, il fit tailler les pierres à l'avance et achever tout le travail dans une seule nuit. Cette porte, qui fut maintenue, s'appela la
porte ducale."
Cependant le duc, de plus en plus épris de la jeune personne, finit par l'épouser et se rendit à Paris."

La méthode abrégée de Deloche d'après Rousseau
Ce manuscrit fut rédigé par Deloche pour mademoiselle de Gueydon, après la mort du duc, qui devint duchesse douairière d'Uzès.
Il s'agit d'une méthode pour apprendre la musique abrégée de la Dissertation sur la musique moderne de Jean-Jacques Rousseau qui avait paru en 1743. Cet essai est l'un des premiers ouvrages théoriques du philosophe qui cherchait à simplifier la notation musicale de son temps. Les signes musicaux était d'après lui trop nombreux, compliqués et leurs usages prêtaient parfois à confusion. Il voulait exprimer les sons et les durées plus simplement, mieux structurer la musique, en faisant en sorte que la valeur des signes ne soit déterminée que par la place qu'ils occupent dans la partition. Cette modification passa par le remplacement des notes par des chiffres.

Deloche reprend dans cet abrégé les principes et les exemples de Rousseau, plus quelques-uns tirés des enseignements de Monteclaire, avec également des exemples tirés de sa propre méthode.
Ce manuscrit témoigne directement de la réception de la méthode de Rousseau dans les enseignements musicaux de l'époque, en particulier pour la pratique du clavecin.
Deloche y copie in fine sa réponse à une lettre d'une élève qui lui faisait part de ses difficultés à apprendre à jouer du clavecin selon la méthode traditionnelle, et qui souhaitait avoir son avis sur la méthode moderne de Rousseau. Deloche indique qu'il n'est point enthousiasmé par la musique moderne, mais que cette dernière est infiniment plus facile à apprendre et à concevoir que l'ancienne. Il conclut avec quatre points techniques sous forme de questions-réponses.

Lionel d'Albiousse. Histoire des ducs d'Uzès. Paris, Champion, 1887. pp. 211-235

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